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  • Photo du rédacteurAlain Verstichel

Le talent de Jane Poupelet au service des gueules cassées

Dernière mise à jour : 23 mars 2019


1914-1918 : jusqu'alors, aucun conflit militaire n'avait atteint pareil degré de violence. Aviation, chars d'assaut, gaz toxiques, artillerie lourde et bombes à fragmentation : les nouveaux types d'armement utilisés pendant la Première Guerre mondiale firent des ravages parmi les soldats. Côté français, on déplorait presqu'un million de morts à la fin des hostilités. Six millions d'hommes revinrent du front gravement blessés. Parmi eux, on comptait 10.000 à 15.000 grands blessés de la face. Dans l'urgence, la chirurgie faciale se constitua comme discipline autonome. Les chirurgiens faisaient ce qu'ils pouvaient, avec les moyens de l'époque. Ils rebouchaient des trous béants au milieu du visage, effectuaient des greffes de peau, reformaient un nez ou un menton lorsque cela était possible. Mais beaucoup de ces soldats restaient défigurés à jamais.



À Paris, en mai 1918, la sculptrice américaine Anna Coleman Ladd ouvrit le « Studio for Portrait Mask », un atelier des masques au service de la chirurgie réparatrice des gueules cassées de la grande guerre, sous l'égide de la Croix-Rouge américaine. Encouragé par le chirurgien Léon Dufourmentel, spécialiste précurseur de la chirurgie maxillo-faciale, l'atelier des masques recruta deux sculpteurs de renom : Jane Poupelet et Robert Wlérick, tous deux amis de longue date.

La fabrication d'un masque se déroulait ainsi : après avoir réalisé par moulage une empreinte de la face de l'homme défiguré, le sculpteur reconstituait avec du plâtre à modeler les traits du visage à partir de photos prises avant la guerre, lorsqu'elles étaient existantes. Puis l'atelier confiait à la prestigieuse maison Christofle la fabrication par galvanoplastie de la prothèse en cuivre. Celle-ci était ensuite recouverte d'une peinture-émail inaltérable et lavable qui imitait le plus précisément possible la couleur de la peau du blessé. Parfois, une barbe ou une moustache étaient cousues. Le Studio for Portrait Mask produisit 220 prothèses entre 1918 et 1919. Aussi imparfaite et parcellaire qu'elle fut, cette méthode permit à des hommes défigurés de retourner dans la société et parfois de retrouver leur ancien travail.


Dans une correspondance datée de 1920, Jane Poupelet confessa « qu'après avoir vu tant de douleurs » jamais plus elle ne sculpterait comme avant. Effectivement, après la guerre, elle mit davantage en avant le dessin et la sculpture animalière. En 1931, un an avant son décès, Jane Poupelet s'associa à la création d'un groupe d'animaliers « le groupe des douze » aux côtés de Charles Artus, Jean-Claude Baugnies de Saint-Marceau, Gaston Chopard, Georges Guyot, Georges Hilbert, Paul Jouve, Marcel Lemar, Adrienne Jouclard, André Margat, Anne-Marie Profillet et François Pompon.



Source : Jane Poupelet, 1874-1932, Gallimard, 2005

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