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Photo du rédacteurAlain Verstichel

Joseph Bernard, l’indépendant


« Le jeune Joseph Bernard avait trouvé pour se rendre à l'école des Beaux-Arts de Lyon un moyen peu banal: il se laissait porter par les eaux du Rhône, ses vêtements à l'abri dans un tonnelet qu'il poussait devant lui. »


Vraie ou fausse, cette anecdote relatée par Renée Boullier (Joseph Bernard, Paris 1972) est une sorte d'allégorie qui résume étonnamment bien la vie du sculpteur, soulignant à la fois sa farouche volonté d'indépendance et l'originalité de son parcours artistique, entre classicisme et modernisme.

Joseph Bernard en 1929

Joseph Bernard est né à Vienne (Isère), le 17 janvier 1866. Fils d'un tailleur de pierre, il manie depuis l'enfance le ciseau et le marteau avec aisance. Grâce à l'obtention d'une bourse, il est admis, dès 1881, dans la section sculpture de l'école des Beaux-Arts de Lyon, puis dans celle de Paris, en 1887, ce qui est une distinction pour ce jeune homme de condition modeste. Pourtant, une fois installé dans la capitale, il déserte rapidement les cours, sans doute déçu par l'enseignement très académique de Jules Cavelier, son professeur. Joseph Bernard s'engage ensuite dans une voie solitaire. Il ne rejoint aucun groupe d'artistes et refuse de se mettre au service d'un sculpteur renommé, contrairement à beaucoup de ses contemporains.


Dans les années 1890, les titres de deux de ses œuvres, « L'espoir vaincu » et « Le fardeau de la vie », en disent long sur son état d'esprit et sur la difficulté de sa condition. Jusqu'en 1911, pour conserver son indépendance, il travaille la nuit dans une imprimerie et sculpte le jour dans son atelier de la cité Falguière, dans le 15e arrondissement.

Vers 1905, une période très féconde débute. Il connaît alors un certain succès et passe pour l'un des chefs de file du retour à la pratique de la taille directe, tendance en vogue au début du XXe siècle. Frappé d'une congestion cérébrale en 1913, il cesse de sculpter jusqu'en 1918. En 1921, il fait bâtir son atelier dans le jardin de sa maison à Boulogne-Billancourt où y travaillera jusqu'à sa mort, en 1931.


Trois mois avant sa disparition, Joseph Bernard, âgé de 64 ans, écrit ces mots au critique René-Jean : « Je commence à peine à pouvoir m'exprimer et je n'ai pas jusqu'ici fait grand-chose. L'espoir est immense de ce que l'on voudrait atteindre. »



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