Henry Arnold (1879-1945) ne faisait pas partie de ces artistes aux egos surdimensionnés ; il n'aimait guère se mettre en avant. Son immense talent de sculpteur, son intelligence inventive, sa grande ouverture d'esprit et sa capacité à transmettre auraient pu faire de lui le chef de file de la sculpture française de l'entre-deux-guerres. Il n'en fut rien. Ses œuvres sont pourtant parmi les plus représentatives des tendances de cette période. Par les rythmes qu'il donnait aux courbes de ses sculptures, Arnold cherchait sans cesse à créer ce qu'il baptisa lui-même des « cheminements lumineux », c'est-à-dire des parcours de lumière harmonieux ayant pour fonction de guider l'œil du spectateur.
Comme il occupait un poste de professeur de dessin à l'école des Arts appliqués, la sculpture ne constitua pas sa principale source de revenus. Henry Arnold bénéficia, pour cette raison, d'une grande liberté artistique et intellectuelle. En revanche, cette situation ne lui offrit que peu d'occasions de travailler sur des commandes publiques, ce qui a très certainement nuit à sa notoriété.
Dans le livre Henry Arnold, Sculpteur (Éditions des amis du musée des années 30, 1994), sa fille, Odile Arnold, rapporte cette anecdote, révélatrice de la modestie et de la bienveillance de père :
« Au sortir d'un Salon, un critique d'art dit [à Henry Arnold] : "En dehors de votre envoi, il n'y a vraiment rien de marquant ici !" Mon père, scandalisé, l'emmène sur-le-champ voir l'œuvre de Despiau qu'il lui fait longuement admirer. Dans son article, le critique ne parla plus que de cette dernière et oublia même de citer le nom d'Henry Arnold. »
Ironie de l'histoire : Charles Despiau sera plus tard un des rares sculpteurs de cette génération a être cité par les historiens d'art (notamment par Elie Faure), alors que le nom d'Henry Arnold sera le plus souvent oublié.
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